Rencontre avec les pêcheurs de homards des Iles Chausey
Le chef Eric Briffard a beau diriger une brigade de 100 personnes en plein coeur d’une grande maison comme le George V, il n’en reste pas moins un insatiable curieux, à la recherche permanente de nouvelles saveurs et de produits d’exception :
“J’aime sortir de ma cuisine et aller à la rencontre de mes fournisseurs. J’ai besoin de conserver cette âme un peu vagabonde et bohème qui me permet de rester en harmonie avec mes racines bourguignonnes et ce que je suis vraiment : quelqu’un de gourmand, à la recherche du Produit !
Eric Beaumard, le directeur du Cinq, qui est originaire de la région de Cancale me parlait souvent des homards de Chausey, un archipel au large de la baie du Mont Saint Michel avec de nombreuses petites iles. Ces homards sont très compliqués à avoir régulièrement car ils sont réputés être les plus savoureux, issus des meilleurs endroits de pêche. A Chausey, les eaux sont très froides et les courants très violents, l’archipel est très isolé avec beaucoup de petits rochers. C’est l’éco-système idéal pour permettre au homard de se sentir protégé et de grandir harmonieusement.
Nous sommes donc partis trois jours pour nouer des contacts avec les pêcheurs. Nous avons embarqué avec eux pour observer la pêche aux casiers. Une fois les homards sortis de l’eau de mer, ils sont expédiés directement. Ils ne passent jamais par les viviers ce qui est une très bonne chose car le vivier stresse le homard, il se retrouve dans une eau qui n’est pas à la bonne température et qui n’est plus de l’eau de mer, il cesse de manger du plancton et perd très vite sa saveur si subtile et si fragile.
Les pêcheurs de Chausey ont une vie très rude. Je suis moi-même quelqu’un de la terre mais j’étais à mille lieu de me douter à quel point les conditions de travail de ces pêcheurs sont difficiles, ils vivent à longueur d’année avec les éléments, ils affrontent les tempêtes, leurs journées sont rythmées pas les marées, ils ont le visage brulé par le soleil et le sel.
Mais quand vous voyez l’attention qu’ils peuvent porter à leur pêche, puis aux homards eux-même, la façon dont ils sont traités avec mille attentions. Quand vous êtes chef et que vous avez eu la chance d’observer tout ça sur le terrain, une fois de retour dans votre cuisine, vous voyez votre homard différemment. vous savez que vous partez d’une matière première exceptionnelle, ça vous oblige à la respecter, à aller plus loin et à sortir le meilleur du homard.
J’étais toujours surpris en allant diner chez un ami chef du côté de Cancale et de voir qu’il préparait des homards de la façon la plus simple possible - il retraduisait vraiment Le Goût ! Le goût d’un produit exceptionnel fraichement sorti de l’eau. C’est pour ça qu’avec Eric Beaumard, nous avons voulu nous rapprocher au maximum du produit, revenir à son origine, savoir qui prépare, qui cultive, qui pêche.
Au Cinq, le homard de Chausey est cuit sur le gros sel dans une cocotte en fonte. J’y met du gros sel gris, du goémon, le homard est à peine blanchi, découpé en demi sur lui même et déglacé à l’eau de mer pour créer une vapeur très rapide qui coagule la chair et permet d’avoir le croquant et la cuisson nacré. On reste totalement dans la pureté du homard, le homard pour lui même sans matière grasse sans beurre ajouté ni caramélisation. (Cliquez ici pour voir le résultat !)
Quand on a des produits aussi net aussi purs ils n’ont pas besoin d’être cachés. Goûtez, vous êtes à Chausey ! “